« Les cendres du froid sont dans le feu qui chante le refus »
René Char
À l’issue du GéoCafé du Directeur Général du 6 mars dernier, la CGT de l’IGN a lancé une consultation des agent·e·s de l’IGN pour recueillir leur avis concernant l’éventuelle signature du protocole par notre organisation syndicale.
Les résultats sont sans appel : les agent·e·s ayant répondu à la consultation ne souhaitent pas que nous ratifiions ce protocole d’accord sur le temps de travail.
Les commissions exécutives des syndicats CGT de l’IGN, réunies en séance extraordinaire dans l’après-midi, prennent donc acte de ces résultats et ne donnent pas mandat aux secrétaires généraux, Samir Khazaz et Benjamin Briant, pour signer ce texte.
Contrairement à ce que le Directeur Général a prétendu lors du GéoCafé du 6 mars dernier, la CGT a pris ses responsabilités en prenant part à 5 des 7 séances dites de “négociations”, et c’est parce que nous le DG nous avait révélé, lors des entretiens post-élections de début janvier, qu’il n’existait plus aucune possibilité d’évolution significative du texte en cours que nous avons fait le choix de ne plus participer à cette mascarade, à ce un jeu de dupe.
Même si nous sommes conscients que nombres d’agents ne se sont pas exprimés, le résultat de la consultation montre un écart entre ce protocole et des agents qui ne demandent rien d’autre que de pouvoir travailler dans de bonnes conditions tout en conservant la possibilité de pouvoir gérer correctement leur vie personnelle. Ce qu’à aucun moment, ni la DRH, ni le DG n’ont voulu prendre en considération.
Ce texte autant incomplet que mal ficelé, est en total décalage avec la réalité des agents, puisque sur le temps de travail des agents de terrain, des agents forestiers, des agents navigants, des mécaniciens aéronautiques, des agents en postes à l’EGI, rien n’est prévu. Le “travail” produit est indigne de ce que nous avions pu connaitre de la part de l’administration IGN, au-delà même de la différence de point de vue sur le fond.
Quand le low-cost touche la DRH, ce sont les agents qui trinquent.
Nous tenons aussi à souligner le caractère ringard et brutal de ce projet de réforme du temps de travail, revenant sur des années de logique d’autonomie des agents dans le travail, de confiance dans le management des cadres pour gérer. Et tout comme le projet de réforme des retraites Borne/Macron, il va impacter particulièrement les agentes de l’établissement.
La CGT restera attentive aux conséquences de cette nouvelle organisation sur la santé des agents, et leur niveau de fatigue, et craint sérieusement le désengagement des agents, qui est la conséquence des RPS. Il faut enfin être clair: les organisations signataires ne représentent pas la majorité des agents, il n’y a donc pas d’accord. Le Dg, par un stratagème grossier, a essayé de passer outre le résultat des élections professionnelles du 8 décembre dernier au motif que le résultat ne lui convenait pas, passant outre la logique d’accord qu’il a lui-même installée. Les promesses du Dg ne sont pas contractuelles et n’engagent que ceux qui y croient.
Ce non-accord va, selon le DG se traduire par la présentation de textes réglementaires au CSA de l’IGN. La CGT agira jusqu’au bout pour défendre avec vous vos conditions de travail, dans cet instance, et les revendications que vous exprimez. Ce n’est pas fini.
Plus largement, il convient d’analyser les raisons profondes du rejet de ce texte par les agents.
1. Le protocole avance un certain nombre de propositions de recul par rapport à la situation actuelle. A titre personnel, lesquelles vous semblent dommageables dans la gestion de votre vie personnelle ?
C’est la suppression de deux possibilités d’absence sur des plages fixes qui semblent le plus dommageable pour les agents, puis la suppression du CHA au profit d’un compte mensuel.
C’est pour nous la traduction d’un échec énorme pour la Direction générale concernant son projet. Les agents de l’IGN avaient jusqu’ici de l’autonomie et de la souplesse dans la gestion de leur temps de travail, et le projet présenté à la signature ne permet pas aux agents de considérer que ce sont des évolutions “positives”.
Alors que la direction promeut l’intrapreneuriat, l’investissement personnel etc.… c’est un projet rétrograde en matière de temps de travail qui est proposé, où la confiance dans l’encadrement pour gérer le temps de travail n’est plus au cœur du management de l’IGN.
2. Durant la négociation, la CGT a fait des propositions pour répondre aux besoins des agents (et de l’établissement). Lesquelles regrettez-vous de ne pas voir apparaître ?
La Direction Générale s’est récemment fourvoyée en prétendant que la CGT de l’IGN n’avait pas porté de propositions dans la négociation, c’est faux. La CGT a porté les revendications des agents après les avoir consultés, dans un esprit de progrès social nécessaire aux agents et à l’établissement, pour être dans la vraie innovation, le travailler autrement en travaillant mieux sans travailler plus.
Le DRH a balayé lors de la négociation la vraie problématique de fond que nous avons pourtant posée : la surcharge de travail induisant des heures supplémentaires non récupérables. C’est pourtant le premier point sur lequel les agents attendaient la Direction qui, elle, a préféré pointer l’hypothétique présentéisme des agents de l’établissement. Quel mépris pour les agents !
De la même façon, le décompte du temps en télétravail a été mis de côté par le DRH et le Dg au motif que cela aurait été contraignant pour les agents. Il est maintenant démontré par de nombreuses études que les agents en télétravail travaillent plus en amplitude horaire avec plus de productivité. Le décompte du temps en télétravail aurait l’avantage de reconnaitre cette réalité.
Par ailleurs, le protocole d’Accord Interministériel sur le Télétravail implique que les établissements publics tels que l’IGN devront d’ici fin 2024 décompter le temps de travail en télétravail. Alors pourquoi en faire l’économie ? Parce que celle-ci se fait sur le dos des agents et que la Direction n’a que faire des agents.
Les agents ont su, eux, exprimer le mal profond de l’organisation du temps de travail actuelle : la charge de travail et leur capacité à récupérer leur temps de travail effectué en plus.
Jusqu’ici, il y avait une forme de “contrat social” dans l’IGN (qui doit interroger par ailleurs) : les agents acceptaient un rythme de travail élevé s’ils pouvaient récupérer le temps de travail réalisé en plus. C’est en ce sens qu’allaient aussi les propositions de mise en place de mesures permettant un droit à la déconnexion et de création d’un profil 40h / 5 jours.
De cela, la Direction Générale n’en a rien fait.
3. Au regard de ces réponses, comment estimez-vous l’impact des mesures décidées par la direction sur votre capacité à vous organiser dans votre vie personnelle ?

C’est assez net, les agents considèrent que le projet de la Direction aura un impact négatif.
La logique de contreparties entretenues par certains n’a pas eu l’impact escompté.
Dans un monde post-pandémie, les agents se sont rappelés qu’ils avaient aussi une vie, en dehors de leur vie professionnelle, et qu’ils n’ont pas envie de se la faire voler.
4. De plus, comment estimez-vous l’impact financier que vont avoir les mesures décidées par la direction sur votre vie personnelle ?

Ce point est assez intéressant puisqu’il y a autant d’agents qui estiment que cette nouvelle organisation du temps de travail ne va pas avoir d’impact financier que l’inverse.
Il est à noter que ce type d’impact n’apparait pas immédiatement mais l’utilisation de plages fixes permet aussi de ne pas avoir besoin de faire garder ses enfants, de bénéficier de tarifs de trains plus avantageux, de ne pas dépenser d’essence pour aller travailler les jours de récup…
5. En conclusion, êtes-vous favorable à ce que la CGT signe cette réforme du temps de travail à l’IGN, telle qu’elle est proposée par la direction, malgré nos désaccords profonds sur son contenu ?

Et voilà donc la raison profonde pourquoi nous n’avons pas signé.
Nous respectons démocratiquement la volonté des agent·e·s.