Catégories
Non classé

La fin de la Carte IGN Papier

Les syndicats CGT ont demandé audience aux pilotes des actions du plan #IGN2021 en mai dernier, demandes restées lettres mortes puisque visiblement la Direction Générale de l’IGN ne les a pas autorisées à échanger avec les représentants des personnels. Les militants CGT ont donc fait en sorte de récupérer des informations auprès d’agents qui estiment que ces sujets doivent être connus et débattus par l’ensemble des personnels. Nous livrons ici nos premières analyses.  

Le préalable serait déjà d’être plus clair : il ne s’agit pas d’arrêter la presse Offset mais la production de carte papier et donc l’imprimerie de l’IGN. Ce n’est ni une interprétation ni une analyse mais bien le sens des propos du Directeur Général, Sébastien Soriano. Celui-ci semble baser sa décision (puisqu’à priori, c’est déjà fait) sur des critères de rentabilité économique et de décision stratégique. Revenons précisément sur ces «critères».

Sur la rentabilité

Pour établir qu’une activité de production est déficitaire puisque c’est de cela dont il s’agit, il faudrait avoir des éléments chiffrés et un bilan des coûts. Or ces éléments n’ont pas été présentés. Nous ne disons pas qu’ils n’existent pas, nous disons qu’en l’état de l’avancée de l’action 26, ils n’ont pas été produits comme appui à la décision. Ce qui a été produit, ce sont les indicateurs de suivis des coûts de production établis au regard des objectifs cibles d’équilibre budgétaire annuel.

Et puis pour être totalement complet, il faut mettre ces coûts de production en regard des recettes produites par la vente des cartes papier. Si on fait l’exercice à partir des éléments connus (budget IGN 2019), le résultat est le suivant:

Coûts du sous-processus « Impression Livraison » : 2,38 millions d’euros

Recettes des produits Grand Public : 10,5 millions d’euros

Gain: 8,12 millions d’euros de recettes nettes

Ce n’est donc à priori pas déficitaire au sens propre du terme.

On pourrait imaginer que parmi les critères de rentabilité, la comparaison avec les autres acteurs du marché pourrait être prégnante dans la décision. L’autre grand acteur, c’est Michelin, qui n’est qu’éditeur et pas imprimeur. Le coût total d’une carte Michelin (édition+impression) se situe aux alentours de 0,58€, contre 1,08€ pour une carte IGN, soit un peu moins du double. Nous comprenons tout à fait que cela puisse laisser rêveur n’importe quel Directeur de la Production mais si on revient sur l’idée que de toute façon, ce n’est pas déficitaire, alors ce critère de rentabilité n’est pas recevable.

Par ailleurs le positionnement sectoriel routier de Michelin fait que celui-ci perd tendanciellement plus de parts de marché que l’IGN qui est principalement positionné sur des cartes de randonnées et des cartes thématiques. Et si on doit constater un élément «positif» de la période sanitaire compliquée que nous venons de traverser, c’est que les français renouant bon gré mal gré avec les vacances en France métropolitaine ont acheté des cartes en nombre, inversant la tendance baissière des dernières années (CF le compte rendu de CODIR du 02/06 où l’on apprend sur la partie DOT : « Le volume de commandes e-commerce traité en mai à Villefranche-sur-Cher a été élevé (+24% par rapport à 2020 et + 57% par rapport à 2019). » Mais à l’aune du nouveau positionnement stratégique de l’IGN issu du COP, évoquer l’idée même de commerce semble être un casus belli au niveau de la Direction Générale.

Pourtant, ces recettes participent à l’équilibre budgétaire de l’IGN et les cartes papier, essentiellement les Top 25, font intrinsèquement partie de l’histoire de l’établissement, et donnent une image de marque positive touchant directement le public acheteur des produits IGN.  

Alors pourquoi l’arrêt de la presse Offset va, selon nous, signer la fin de la carte papier ?

Tout simplement parce que l’alternative induite par l’arrêt de la presse, c’est la sous-traitance (dont nous rappelons pourtant que le Dg affirme qu’il n’est pas fan) de tout ou partie de la production imprimée. Or cette sous-traitance, même si on imagine que cela pourrait coûter moins cher présente un inconvénient majeur, celui de devoir sortir de l’argent frais et cela n’est pas si simple. Jusqu’ici, la vente des cartes de l’année N finance la production des cartes de l’année N+1. Avec la sous-traitance, il faudra d’abord financer la production des cartes l’année N avant de les vendre en année N+1.

Donc si on imagine que les 1,6 millions de cartes qui coûtent à produire à peu près 1,8 millions d’euros par an à produire pourraient être sous-traitées à un coût estimé de 1 million d’euros, le problème est qu’il va falloir le sortir ce 1 million. Par ailleurs, ne sont évoqués ci-dessus que les coûts de la sous-traitance mais il va falloir des agents pour la gérer cette sous-traitance, et cela va avoir un impact. Au final, les économies ne seront que mineures et les impacts budgétaires seront tellement forts que rapidement, la décision d’arrêter la publication des cartes papier s’imposera.

Si certains s’imaginent aussi faire un coup avec la vente de la machine, ils ont un peu vite oublié que lors de la vente d’une précédente presse Offset par France Domaine, tel que cela devrait se faire pour celle-ci, l’IGN n’a rien récupéré de la vente. L’inquiétude permanente de la bonne utilisation des deniers publics par le Directeur Général devrait interroger les intentions réelles de ceux qui militent pour l’arrêt de la presse Offset.

L’autre élément qui nous fait craindre la fin de la carte papier est la volonté de sous-traitance de la gestion du stock de cartes à destination des diffuseurs. Sur ce point une étude externe a été produite par le cabinet Spinpart (qui fait du « conseil en Management et Organisation » et dont la devise est : « Agitateur de votre transformation » tout un programme !!). Parmi les scénarios que semblent présenter ce cabinet qui est tout sauf gauchiste, il en existe un plaidant pour la sous-traitance totale de l’activité et l’autre pour une solution interne entrainant le rapprochement du département stock avec le département logistique et enfin un scénario hybride. Sachant que le scénario hybride entraîne une complexité de gestion et que l’objectif de la manip est de « récupérer » des ETP, on vous laisse imaginer quel scénario emporte l’adhésion de la Direction Générale. Au passage, le nombre « d’ETP récupérés » se porte à 3. La considération de l’aspect humain des agents qui sont à Villefranche, à qui on va demander de changer d’activité à 3 ou 4 ans de la retraite ? La conscience qu’en externalisant le stock de cartes, l’IGN va perdre la maîtrise de coûts de distribution et que c’est donc l’activité de carte grand public qui est en jeu ? Rien de tout cela…

C’est la casse d’un outil qui fonctionne, budgétairement équilibré qui se profile, sans que des raisons sérieuses ne soient explicitées et sans que des alternatives techniques ne soient réellement discutées. Une étude pour un remplacement par une presse numérique a été lancée en février 2020, mais sans réelle direction et soutien de la part du pilote de l’action… De quoi amuser la galerie.

Et quelles perspectives pour les personnels ?

Aucune, rien de sérieux. Le pilote n’a même pas organisé de réunion des agents pour les informer des travaux en cours. Il semble que la date d’Octobre 2023 soit arbitrée. Pourquoi ? Comment ? Quelles perspectives de reconversion ? Rien, aucune info.

Le plan #IGN2021 devait considérer les agents et leur donner des perspectives. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a un gap entre les Géo-discours et la réalité.

La CGT de l’IGN appelle tous les agents à exprimer dès qu’ils en ont l’occasion et notamment auprès du Dg, leur attachement à la carte papier.

La CGT demande à la Direction Générale à sortir de l(‘)a (im)posture pseudo budgétaire sur cette production historique dans l’IGN.

10 réponses sur « La fin de la Carte IGN Papier »

Pour infos, je suis un retraité de la poste.
Je regrette qu’il soit projeté la disparition de ces cartes papier. en effet, je suis un fan des cartes quelque soit le type (routière, mappemonde, etc…) avec plus particulièrement un faible pour les cartes IGN.
Par quoi seraient-elle remplacées ? Par des applications sur téléphone portable ? Ça ne sera plus du tout pareil. On a pas une même vision d’ensemble. Avec les cartes papiers, on peut passer d’une page à une autre s’il s’agit d’un guide ou étaler la carte sur une table dans le cas d’une carte unique, alors que sur un téléphone, c’est au mieux 10/12 cm sur 7/8 cm. D’ailleurs je n’ai pas de téléphone portable non pas que je ne saurais pas m’en servir, mais parce que je n’en veux pas.
Devrais-je donc en acheter un pour pouvoir me guider si je fais des balades, des randonnées ou autres utilisations ?
En tant que usager de ces cartes, je vous soutiens dans votre combat pour maintenir l’impression des cartes papiers IGN. Arrêtons la dématérialisation à tout va.

UN appel en ligne est nécessaire pour sauver la carte papier…Fédérations de randonneurs , de sportiifs, les cueilleurs de champignons seront de la partie….. La numérisation a ses limites..

Il faudrait une pétition publique de soutien qui rencontrerait un écho non négligeable dans le monde des randonneurs.

Ah ! Et bien voilà, l’écologie sacrifiée sur l’autel de la technologie. Avez-vous seulement pensé à tous ceux qui ne possèdent pas de téléphone portable Par choix ou par prix d’un tel engin ? … et tous les datas center qui vont encore produire encore plus de CO2 ?… quelle incohérence, on supprime les sacs plastiques pour des sacs papiers un peu partout et vous, vous faites le contraire.
J’espère que nous allons être nombreux à exiger des cartes papier

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.